La douleur, sentinelle indispensable FR | EN

DOI : 10.34847/nkl.ab4a8pco Publique
Auteurs : Nicolas Malebranche et Thomas Rortais
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Texte de Nicolas Malebranche lu par Thomas Rortais.
Enregistrement : service PAVM | DNUM de l’Université Jean Moulin Lyon 3 dans le cadre du webdocumentaire https://medecin-et-douleur-16e18e.huma-num.fr/

Introduction (Raphaële Andrault et Ariane Bayle) :
Dans l'ouvrage De la recherche de la vérité (1674-1678), le philosophe Nicolas Malebranche souligne l’efficacité pratique de la douleur, qu...i nous avertit du danger et nous engage à éloigner immédiatement notre corps de ce qui lui porte atteinte. Il imagine ce qui se passerait si, au lieu d’être avertis que notre main brûle par la sensation de douleur, nous voyions simplement, comme de l’extérieur, la lésion des tissus de notre main. Pour lui, nous serions alors indifférents, voire favorables à sa destruction. Il en conclut que la douleur est utile à la préservation du corps.

Texte (Nicolas Malebranche) :
Il faut de plus considérer que si l’âme n’apercevait que ce qui se passe dans sa main, quand elle se brûle, si elle n’y voyait que le mouvement et la séparation de quelques fibres, elle ne s’en mettrait guère en peine : et même elle pourrait quelquefois par fantaisie et par caprice y prendre quelque satisfaction, comme ces fantasques qui se divertissent à tout rompre dans leurs emportements et dans leurs débauches.
Ou bien de même qu’un prisonnier ne se mettrait guère en peine, s’il voyait qu’on démolît les murailles qui l’enferment, et que même il s’en réjouirait dans l’espérance d’être bientôt délivré, ainsi, si nous n’apercevions que la séparation des parties de notre corps, lorsque nous nous brûlons, ou que nous recevons quelque blessure, nous nous persuaderions bientôt que notre bonheur n’est pas d’être renfermé dans un corps, qui nous empêche de jouir des choses qui nous doivent rendre heureux ; et ainsi nous serions bien aises de le voir détruire.
Il s’ensuit de là, que c’est avec une grande sagesse, que l’Auteur de l’union de notre âme avec notre corps, a ordonné que nous sentions de la douleur, quand il arrive au corps un changement capable de lui nuire, comme quand une aiguille entre dans la chair, ou que le feu en sépare quelques parties ; et que nous sentions du chatouillement, ou une chaleur agréable, quand ces mouvements sont modérés, sans apercevoir la vérité de ce qui se passe dans notre corps, ni les mouvements de ces fibres, dont nous venons de parler.

Réf. : Nicolas Malebranche, De la Recherche de la vérité [1674-1678], éd. G. Rodis-Lewis, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de La Pléiade », 1979, livre premier, chap. 10, p. 94-95.

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Déposée par Raphaele Andrault le 15/12/2021
nakala:title Français La douleur, sentinelle indispensable
Anglais Pain, an Indispensable Sentinel
nakala:creator Nicolas Malebranche et Thomas Rortais
nakala:created 2020
nakala:type dcterms:URI Son
nakala:license Creative Commons Attribution 4.0 International (CC-BY-4.0)
dcterms:description Français Texte de Nicolas Malebranche lu par Thomas Rortais.
Enregistrement : service PAVM | DNUM de l’Université Jean Moulin Lyon 3 dans le cadre du webdocumentaire https://medecin-et-douleur-16e18e.huma-num.fr/

Introduction (Raphaële Andrault et Ariane Bayle) :
Dans l'ouvrage De la recherche de la vérité (1674-1678), le philosophe Nicolas Malebranche souligne l’efficacité pratique de la douleur, qui nous avertit du danger et nous engage à éloigner immédiatement notre corps de ce qui lui porte atteinte. Il imagine ce qui se passerait si, au lieu d’être avertis que notre main brûle par la sensation de douleur, nous voyions simplement, comme de l’extérieur, la lésion des tissus de notre main. Pour lui, nous serions alors indifférents, voire favorables à sa destruction. Il en conclut que la douleur est utile à la préservation du corps.

Texte (Nicolas Malebranche) :
Il faut de plus considérer que si l’âme n’apercevait que ce qui se passe dans sa main, quand elle se brûle, si elle n’y voyait que le mouvement et la séparation de quelques fibres, elle ne s’en mettrait guère en peine : et même elle pourrait quelquefois par fantaisie et par caprice y prendre quelque satisfaction, comme ces fantasques qui se divertissent à tout rompre dans leurs emportements et dans leurs débauches.
Ou bien de même qu’un prisonnier ne se mettrait guère en peine, s’il voyait qu’on démolît les murailles qui l’enferment, et que même il s’en réjouirait dans l’espérance d’être bientôt délivré, ainsi, si nous n’apercevions que la séparation des parties de notre corps, lorsque nous nous brûlons, ou que nous recevons quelque blessure, nous nous persuaderions bientôt que notre bonheur n’est pas d’être renfermé dans un corps, qui nous empêche de jouir des choses qui nous doivent rendre heureux ; et ainsi nous serions bien aises de le voir détruire.
Il s’ensuit de là, que c’est avec une grande sagesse, que l’Auteur de l’union de notre âme avec notre corps, a ordonné que nous sentions de la douleur, quand il arrive au corps un changement capable de lui nuire, comme quand une aiguille entre dans la chair, ou que le feu en sépare quelques parties ; et que nous sentions du chatouillement, ou une chaleur agréable, quand ces mouvements sont modérés, sans apercevoir la vérité de ce qui se passe dans notre corps, ni les mouvements de ces fibres, dont nous venons de parler.

Réf. : Nicolas Malebranche, De la Recherche de la vérité [1674-1678], éd. G. Rodis-Lewis, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de La Pléiade », 1979, livre premier, chap. 10, p. 94-95.
Anglais https://medecin-et-douleur-16e18e.huma-num.fr/en/excerpts

Introduction (Raphaële Andrault and Ariane Bayle, translated by Sarah Novak):
In his book De la recherche de la vérité [On the Search for Truth] (1674-1678), the philosopher Nicolas Malebranche emphasizes the practical effectiveness of pain, which warns us of danger and urges us to immediately remove our body from whatever is harming it. He imagines what would happen if, instead of being warned by the sensation of pain that our hand was burning, we simply saw, as if from outside our own body, lesions appear in the tissue of our hand. In his view, this would cause us to become indifferent or even favorable to our own destruction. He concludes that pain is useful for the preservation of the body.

Ref: Nicolas Malebranche, De la Recherche de la vérité [1674-1678], ed. G. Rodis-Lewis, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de La Pléiade », 1979, Book I, chap. 10, p. 94-95.
dcterms:language dcterms:RFC5646 français (fr)
dcterms:subject Français Nicolas Malebranche
Français Douleur
Français histoire de la médecine
Anglais Nicolas Malebranche
Anglais Pain
Anglais history of medicine