Lettre de René-Antoine Ferchault de Réaumur à Jean-François Séguier, 1746-05-18

DOI : 10.34847/nkl.98486i9z Publique
Auteur : René-Antoine Ferchault de Réaumur

[transcription] A Paris, ce 18 mai 1746.

Je reçus, Monsieur, enfin, hier, ce baril qui vous a coûté tant de soins et de peine, et pour lequel je ne saurais vous faire assez de remerciements. Il y a plus d'un mois que son arrivée m'avait été annoncéepar MM. Gosse, et c'est ce qui m'a fait différer jusqu'à ce jour à répondre à votre lettre du 3me février. Je sais que vous êtes impatient d'apprendre... en quel état il m'est parvenu et j'avais espéré d'être plutôt enétat de vous en instruire. Vous n'avez négligé aucunedes précautions les plus propres à empêcher lesplumes de chaque oiseau de souffrir des agitations et des secousses de la route. Non-seulement chacund'eux en particulier était bien maintenu dans sa forme par le linge dont vous l'aviez enveloppé, maistous ensemble se trouvaient bien assujettis par la filasse avec laquelle vous aviez achevé de remplir lesvides. Je ne dois pourtant pas vous cacher, quelque regret que j'aie à vous le dire, que tant de jolis oiseaux que vous aviez rassemblés, ne me sont pasarrivés aussi bien conditionnés que vos attentions lepromettaient. Ce n'est point votre faute, c'est la mienne. Je vous ai parlé autrefois du vinaigre comme d'une liqueur propre à conserver les oiseaux, sansm'expliquer assez par les précautions avec lesquellesil en fallait faire usage, et j'ai négligé de vous faire remarquer depuis que, dans le petit mémoire imprimé, je n'indique que l'esprit-de-vin ou des eaux-de-vie de différentes espèces comme des liqueursconvenables. Aussi vous avouerais-je que j'ai été inquiet depuis que vous m'avez eu appris qu'avantde faire partir le baril vous l'aviez rempli de vinaigre et du meilleur que vous aviez pu trouver. Mes expériencesm'avaient prouvé que les petits oiseaux nedevaient être tenus que quelques semaines danscette liqueur, après quoi il fallait les en tirer et les faire sécher. Il n'y a que les gros oiseaux qui puissenty soutenir pendant plusieurs mois, encore ne faut-il pas que ce soit dans du vinaigre aussi fort que celuique vous avez pris par préférence. Le plus grand effet de l'action du vinaigre est sur les os et sur les cornes. Avec le temps, il réduit les os en bouillie et rend la corne très molle. Celle de la plupart des becsde vos petits oiseaux avait été rendue aussi flexible qu'un papier mouillé. Les os du crâne, ceux despattes, des jambes et des cuisses ont été encore plus ramollis. Je ne sais si je puis espérer qu'ils reprendrontune consistance suffisante, mais les oiseaux en resteront toujours défigurés. Il y en aura pourtantplusieurs de moyenne taille et surtout les grands qui seront sauvés de ce désastre. Les Francolins[1]par exemple ont très peu souffert.
Ces morceaux de parchemin sur lesquels j'aurais été charmé de lire au moins le nom de chaque oiseau,n'avaient pas conservé la plus légère trace de ce quevous aviez pris la peine d'y écrire. Dans l'esprit-de vinou l'eau-de-vie les lettres conservent tout leurnoir pendant une longue suite d'années. Mais je sais par des expériences que j'en ai faites, que souventl’on ne pense pas à ce qu'on sait le mieux. Vousn'ignorez pas assurément qu'il n'est guère de meilleurdissolvant de l'encre que le vinaigre ; qu'on s'en sert pour ôter des taches de dessus le linge. Ce qui metouche le plus, dans ce désagréable événement, c'estque j'ai peur que vous ne l'appreniez avec quelquepeine. Mais je n'aurais pu vous le cacher sansexposer les récoltes que vous voulez continuer de faire pour moi, à ne pas mieux réussir. Au reste necraignez point de faire partir à sec ou simplement humides, les petits oiseaux qui auront resté une quinzaine de jours dans l'esprit-de-vin ou dans de forte eau-de-vie. Les gros oiseaux qui ont resté unmois dans de pareille liqueur, sont de même hors derisque de se corrompre. Tout ce qui pourrait leur arriver,s'ils n'étaient pas dans des vases bien clos, serait d'être attaqués par des insectes carnassiers. Il n'y arien de pareil à craindre dans un baril tel que votredernier. Quand ils restent trop longtemps en route, ils se dessèchent plus qu'on ne voudrait ; ils perdentde leur volume, les côtes se rapprochent et la capacitédu ventre diminue. On pare cet inconvénient, si,avant que de mettre l'oiseau dans l'esprit-de-vin oulorsqu'on l'en retire, on lui remplit le ventre de bourre ou de filasse, etc. Mais vous avez reçu apparemment celle de mes lettres dans laquelle je vousai parlé d'un moyen extrêmement simple de mettreles oiseaux en état de m'arriver très bien conditionnéset sans employer aucune liqueur. C'est après les avoir vidés, de leur remplir le ventre d'alun et d'en faire passer par le bec jusqu'à ce que l'œsophage ensoit bien rempli. En ajoutant ensuite les précautionsque vous avez prises ci-devant pour conserver la direction des plumes et empêcher les ballottements des oiseaux pendant la route, vous pouvez être sûrqu'ils m'arriveront dans l'état où vous souhaitez queje les reçoive. Ce qui est très certain, c'est que jen'aurai pas plus de remerciements à vous faire deceux de vos envois dont je tirerai le meilleur parti,que j'ai à vous en faire du dernier, du mauvais succèsduquel vous devez vous en prendre uniquement à moi.
Des espèces de pigeons que vous m'offrez, j'accepte les tabellariaeou courriersque je n'ai point et celle qui a la grosseur d'un petit coq et qu'on nomme à VéroneGalleto.
Il m'est venu des environs de Montpellier un grand héron blanc[2], mais qui avait été maltraité par le coup de fusil. Ainsi il ne me fera pas refuser le vôtre. J'ai l’Ardea stellaris ou butor[3], le Lagopus ou perdrix blanche[4].
Je ne puis voir qu'avec beaucoup de reconnaissance tout ce que vous imaginez et tout ce que voustentez pour parvenir à me procurer un cedrone.
Il n'y a que l'occasion de vous faire parvenir les portraits qui seraient agréables à M. Bozzi, grand vicaire du prince de Tarente, qui me manque. Je crains d'abuser des facilités que j'ai de faire partir des petits paquets par la voie de la poste. Si je trouvequelque occasion de vous les faire parvenir, je ne lamanquerai pas. Mais c'est uniquement à votre nomque ce présent devrait être fait. N'ayant aucunementl'honneur de connaître M. Bozzi, il pourrait lui paraître singulier que je m'adressasse à lui pour l'engager à s'employer pour moi.
Savez-vous quel est le canton de l'Allemagne où le Rebhanest le moins rare. On ne m'a jamais parlé que vaguement des lieux où il se trouve.
J'ai un moineau blanc qui a été tué à la campagne parmi des moineaux de l'espèce la plus commune, auxquels il est d'ailleurs parfaitement semblable. Jen'ai point de serin noir à moins qu'on ne mette aurang des serins, un oiseau de leur taille, à bec rouge, qui vient du Brésil.
Le Loxia m'est venu de Berlin. J'ai le mâle et la femelle, mais qui ne sont pas trop bien conditionnés. Savez-vous ce qui les rend si sacrés aux environs de Vérone qu'on n'y ose attenter à leur vie? Je veux dire si vous savez quel est le préjugé qui les fait sifort respecter. Il vit sans doute de grain. De quel grain les nourrit-on ? A-t-il quelque ramage agréable?
Lui apprend-on à parler ?
Vous savez faire naître le hasard et vous préparez pour la suite celui qui me vaudra une grue.
Votre carpione[5] du lac de Garde était réduit en bouillie. J'en ai eu grand regret. Il était, ce me semble, comme le reste, dans le vinaigre. Vous m'aviez cependant marqué l'avoir mis dans l'eau-de-vie.
Vous devez avoir reçu, il y a déjà longtemps, le manuscrit où vous trouverez collationné fidèlementpar dom Raverdi, ce que vous aviez souhaité l'être,à l'abbaye Saint-Germain pour un de vos amis.
Je compte faire partir avec cette lettre, à l'adresse du comte Mazzoleni, l'ouvrage de M. Tremblay[6]oucelui de M. Bonnet, et lui envoyer par un des ordinaires prochains celui des deux qui sera resté. Leur prix est peu de chose ; ils ne doivent pas manquer à un recueil de livres d'histoire naturelle tel que le vôtre.
Un corps de toute l'histoire naturelle qui est l'objet des livres et des mémoires que vous rassemblez està la vérité un ouvrage dont l'immensité doit effrayer.Mais avec un grand amour et un amour persévérant pour le travail et avec un esprit aussi bon que vous l'avez, on conduit loin ce qui n'eût pas semblé exécutable.L'intérêt que je prends au progrès des différentes parties de cette science ne me permet pas devoir, sans beaucoup de satisfaction, le zèle avec lequel vous cherchez à y contribuer, et me fait prévoir avec plaisir qu'elles ne sauraient manquer de vous devoir beaucoup.
J'ai l'honneur d'être, avec une parfaite estime, une véritable reconnaissance et un très sincère attachement,Monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur.
De Réaumur.

Je vous prie d'assurer de mes respects M. le marquis Maffei.
[1]Francolinusvulgaris, St.eph.— Perdrix Francolinus, Latr

[2] C'est incontestablement le Héron Aigrette, Ardea egrettade Linn.,Gmel.,etc.

[3]Ardea purpurea Linn., sans doute, appelé stellarisà cause des taches de diverses couleurs qu'il porte sur le cou.

[4] Sans doute le Lagopus mutus Rich., Tetrao lagopusLinn.,commun dans lesPyrénées.
[5]Espèce de truite? C'est le nom donné dans les Alpes au Salmo AlpinusBl.

[6]V. plus haut, page 37

[Georges Musset (éd.), Lettres inédites de Réaumur, La Rochelle, Veuve Mareschal et Martin, 1886, p. 41-47]

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Creative Commons Attribution 4.0 International (CC-BY-4.0)
Citer
Ferchault de Réaumur, René-Antoine (2021) «Lettre de René-Antoine Ferchault de Réaumur à Jean-François Séguier, 1746-05-18» [Letter] NAKALA. https://doi.org/10.34847/nkl.98486i9z
Déposée par Emmanuelle Chapron le 31/10/2021
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Je reçus, Monsieur, enfin, hier, ce baril qui vous a coûté tant de soins et de peine, et pour lequel je ne saurais vous faire assez de remerciements. Il y a plus d'un mois que son arrivée m'avait été annoncéepar MM. Gosse, et c'est ce qui m'a fait différer jusqu'à ce jour à répondre à votre lettre du 3me février. Je sais que vous êtes impatient d'apprendre en quel état il m'est parvenu et j'avais espéré d'être plutôt enétat de vous en instruire. Vous n'avez négligé aucunedes précautions les plus propres à empêcher lesplumes de chaque oiseau de souffrir des agitations et des secousses de la route. Non-seulement chacund'eux en particulier était bien maintenu dans sa forme par le linge dont vous l'aviez enveloppé, maistous ensemble se trouvaient bien assujettis par la filasse avec laquelle vous aviez achevé de remplir lesvides. Je ne dois pourtant pas vous cacher, quelque regret que j'aie à vous le dire, que tant de jolis oiseaux que vous aviez rassemblés, ne me sont pasarrivés aussi bien conditionnés que vos attentions lepromettaient. Ce n'est point votre faute, c'est la mienne. Je vous ai parlé autrefois du vinaigre comme d'une liqueur propre à conserver les oiseaux, sansm'expliquer assez par les précautions avec lesquellesil en fallait faire usage, et j'ai négligé de vous faire remarquer depuis que, dans le petit mémoire imprimé, je n'indique que l'esprit-de-vin ou des eaux-de-vie de différentes espèces comme des liqueursconvenables. Aussi vous avouerais-je que j'ai été inquiet depuis que vous m'avez eu appris qu'avantde faire partir le baril vous l'aviez rempli de vinaigre et du meilleur que vous aviez pu trouver. Mes expériencesm'avaient prouvé que les petits oiseaux nedevaient être tenus que quelques semaines danscette liqueur, après quoi il fallait les en tirer et les faire sécher. Il n'y a que les gros oiseaux qui puissenty soutenir pendant plusieurs mois, encore ne faut-il pas que ce soit dans du vinaigre aussi fort que celuique vous avez pris par préférence. Le plus grand effet de l'action du vinaigre est sur les os et sur les cornes. Avec le temps, il réduit les os en bouillie et rend la corne très molle. Celle de la plupart des becsde vos petits oiseaux avait été rendue aussi flexible qu'un papier mouillé. Les os du crâne, ceux despattes, des jambes et des cuisses ont été encore plus ramollis. Je ne sais si je puis espérer qu'ils reprendrontune consistance suffisante, mais les oiseaux en resteront toujours défigurés. Il y en aura pourtantplusieurs de moyenne taille et surtout les grands qui seront sauvés de ce désastre. Les Francolins[1]par exemple ont très peu souffert.
Ces morceaux de parchemin sur lesquels j'aurais été charmé de lire au moins le nom de chaque oiseau,n'avaient pas conservé la plus légère trace de ce quevous aviez pris la peine d'y écrire. Dans l'esprit-de vinou l'eau-de-vie les lettres conservent tout leurnoir pendant une longue suite d'années. Mais je sais par des expériences que j'en ai faites, que souventl’on ne pense pas à ce qu'on sait le mieux. Vousn'ignorez pas assurément qu'il n'est guère de meilleurdissolvant de l'encre que le vinaigre ; qu'on s'en sert pour ôter des taches de dessus le linge. Ce qui metouche le plus, dans ce désagréable événement, c'estque j'ai peur que vous ne l'appreniez avec quelquepeine. Mais je n'aurais pu vous le cacher sansexposer les récoltes que vous voulez continuer de faire pour moi, à ne pas mieux réussir. Au reste necraignez point de faire partir à sec ou simplement humides, les petits oiseaux qui auront resté une quinzaine de jours dans l'esprit-de-vin ou dans de forte eau-de-vie. Les gros oiseaux qui ont resté unmois dans de pareille liqueur, sont de même hors derisque de se corrompre. Tout ce qui pourrait leur arriver,s'ils n'étaient pas dans des vases bien clos, serait d'être attaqués par des insectes carnassiers. Il n'y arien de pareil à craindre dans un baril tel que votredernier. Quand ils restent trop longtemps en route, ils se dessèchent plus qu'on ne voudrait ; ils perdentde leur volume, les côtes se rapprochent et la capacitédu ventre diminue. On pare cet inconvénient, si,avant que de mettre l'oiseau dans l'esprit-de-vin oulorsqu'on l'en retire, on lui remplit le ventre de bourre ou de filasse, etc. Mais vous avez reçu apparemment celle de mes lettres dans laquelle je vousai parlé d'un moyen extrêmement simple de mettreles oiseaux en état de m'arriver très bien conditionnéset sans employer aucune liqueur. C'est après les avoir vidés, de leur remplir le ventre d'alun et d'en faire passer par le bec jusqu'à ce que l'œsophage ensoit bien rempli. En ajoutant ensuite les précautionsque vous avez prises ci-devant pour conserver la direction des plumes et empêcher les ballottements des oiseaux pendant la route, vous pouvez être sûrqu'ils m'arriveront dans l'état où vous souhaitez queje les reçoive. Ce qui est très certain, c'est que jen'aurai pas plus de remerciements à vous faire deceux de vos envois dont je tirerai le meilleur parti,que j'ai à vous en faire du dernier, du mauvais succèsduquel vous devez vous en prendre uniquement à moi.
Des espèces de pigeons que vous m'offrez, j'accepte les tabellariaeou courriersque je n'ai point et celle qui a la grosseur d'un petit coq et qu'on nomme à VéroneGalleto.
Il m'est venu des environs de Montpellier un grand héron blanc[2], mais qui avait été maltraité par le coup de fusil. Ainsi il ne me fera pas refuser le vôtre. J'ai l’Ardea stellaris ou butor[3], le Lagopus ou perdrix blanche[4].
Je ne puis voir qu'avec beaucoup de reconnaissance tout ce que vous imaginez et tout ce que voustentez pour parvenir à me procurer un cedrone.
Il n'y a que l'occasion de vous faire parvenir les portraits qui seraient agréables à M. Bozzi, grand vicaire du prince de Tarente, qui me manque. Je crains d'abuser des facilités que j'ai de faire partir des petits paquets par la voie de la poste. Si je trouvequelque occasion de vous les faire parvenir, je ne lamanquerai pas. Mais c'est uniquement à votre nomque ce présent devrait être fait. N'ayant aucunementl'honneur de connaître M. Bozzi, il pourrait lui paraître singulier que je m'adressasse à lui pour l'engager à s'employer pour moi.
Savez-vous quel est le canton de l'Allemagne où le Rebhanest le moins rare. On ne m'a jamais parlé que vaguement des lieux où il se trouve.
J'ai un moineau blanc qui a été tué à la campagne parmi des moineaux de l'espèce la plus commune, auxquels il est d'ailleurs parfaitement semblable. Jen'ai point de serin noir à moins qu'on ne mette aurang des serins, un oiseau de leur taille, à bec rouge, qui vient du Brésil.
Le Loxia m'est venu de Berlin. J'ai le mâle et la femelle, mais qui ne sont pas trop bien conditionnés. Savez-vous ce qui les rend si sacrés aux environs de Vérone qu'on n'y ose attenter à leur vie? Je veux dire si vous savez quel est le préjugé qui les fait sifort respecter. Il vit sans doute de grain. De quel grain les nourrit-on ? A-t-il quelque ramage agréable?
Lui apprend-on à parler ?
Vous savez faire naître le hasard et vous préparez pour la suite celui qui me vaudra une grue.
Votre carpione[5] du lac de Garde était réduit en bouillie. J'en ai eu grand regret. Il était, ce me semble, comme le reste, dans le vinaigre. Vous m'aviez cependant marqué l'avoir mis dans l'eau-de-vie.
Vous devez avoir reçu, il y a déjà longtemps, le manuscrit où vous trouverez collationné fidèlementpar dom Raverdi, ce que vous aviez souhaité l'être,à l'abbaye Saint-Germain pour un de vos amis.
Je compte faire partir avec cette lettre, à l'adresse du comte Mazzoleni, l'ouvrage de M. Tremblay[6]oucelui de M. Bonnet, et lui envoyer par un des ordinaires prochains celui des deux qui sera resté. Leur prix est peu de chose ; ils ne doivent pas manquer à un recueil de livres d'histoire naturelle tel que le vôtre.
Un corps de toute l'histoire naturelle qui est l'objet des livres et des mémoires que vous rassemblez està la vérité un ouvrage dont l'immensité doit effrayer.Mais avec un grand amour et un amour persévérant pour le travail et avec un esprit aussi bon que vous l'avez, on conduit loin ce qui n'eût pas semblé exécutable.L'intérêt que je prends au progrès des différentes parties de cette science ne me permet pas devoir, sans beaucoup de satisfaction, le zèle avec lequel vous cherchez à y contribuer, et me fait prévoir avec plaisir qu'elles ne sauraient manquer de vous devoir beaucoup.
J'ai l'honneur d'être, avec une parfaite estime, une véritable reconnaissance et un très sincère attachement,Monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur.
De Réaumur.

Je vous prie d'assurer de mes respects M. le marquis Maffei.
[1]Francolinusvulgaris, St.eph.— Perdrix Francolinus, Latr

[2] C'est incontestablement le Héron Aigrette, Ardea egrettade Linn.,Gmel.,etc.

[3]Ardea purpurea Linn., sans doute, appelé stellarisà cause des taches de diverses couleurs qu'il porte sur le cou.

[4] Sans doute le Lagopus mutus Rich., Tetrao lagopusLinn.,commun dans lesPyrénées.
[5]Espèce de truite? C'est le nom donné dans les Alpes au Salmo AlpinusBl.

[6]V. plus haut, page 37

[Georges Musset (éd.), Lettres inédites de Réaumur, La Rochelle, Veuve Mareschal et Martin, 1886, p. 41-47]
xsd:string [personnes citées] Abraham Trembley, Angelo Mazzoleni, Dom Joseph Raverdy, famille Gosse, M. Bonnet, Scipione Maffei
xsd:string [reférence bibliographique citée] Bonnet Charles, Traité d'insectologie ou observations sur les pucerons, Paris, Durand, 1745
. Trembley, Mémoires pour servir à l'historie d'un genre de polypes d'eau douce, Paris, Durand, 1744, 2 vol. in-8
xsd:string [lettre editée aussi sur] G. Musset (éd.), Lettres inédites de Réaumur, La Rochelle, Veuve Mareschale & Martin, 1886, p. 41-47.
dcterms:format xsd:string fichier pdf
dcterms:language xsd:string français
dcterms:publisher xsd:string [responsable édition] Emmanuelle Chapron
dcterms:rightsHolder xsd:string non précisée
dcterms:source xsd:string [lieu de Conservation] La Rochelle, Médiathèque Michel-Crépeau [cote]ms. 664, lettre 9
dcterms:spatial xsd:string [lieu d'expédition] Paris (France)
xsd:string [lieu de destination] Vérone (République de Venise)
dcterms:subject xsd:string Sciences naturelles (général)
dcterms:type xsd:string Correspondance Séguier