Texte de Ambroise Paré lu par Thomas Rortais.
Enregistrement : service PAVM | DNUM de l’Université Jean Moulin Lyon 3 dans le cadre du webdocumentaire https://medecin-et-douleur-16e18e.huma-num.fr/
Introduction (Raphaële Andrault et Ariane Bayle) :
Dans le livre Des Contusions, combustions [brûlures] et gangrènes, Paré raconte plusieurs cas tirés de sa longue expérience de la chirurgie mili...taire. Il fait ici le récit des difficultés qui ont rythmé la cure d’un soldat amputé du bras lors de la campagne de Turin en 1536. Le chirurgien observe les signes de la douleur extrême éprouvée par le patient quinze jours après l’amputation et souligne à quel point les mauvaises conditions de vie du convalescent aggravent cette douleur. Le soin que met Paré à réchauffer le corps du soldat par tous les moyens, puis à l’alimenter, témoigne bien de la compassion et de l’attitude charitable que le chirurgien montre constamment dans ses écrits.
Texte (Ambroise Paré) :
[…] Je ne puis omettre à raconter (pour s’en donner garde) que quinze jours après survint au pauvre soldat un spasme, lequel j’avais paravant pronostiqué à cause du froid, et qu’il était mal couché en un grenier, là où non seulement avait peu de couverture, mais aussi était exposé à tous vents, sans feu, et autres choses nécessaires à la vie humaine. Et le voyant en tel spasme et rétractation de membres, les dents serrées, les lèvres et toute la face tortue et retirée, comme s’il eut voulu rire du rire sardonique, qui sont signes manifestes de convulsion : ému de pitié, et désirant faire le dû de mon art, ne pouvant autre chose lui faire pour lors, le fis mettre en une étable, en laquelle était grand nombre de bétail, et grande quantité de fumier, puis trouvai moyen d’avoir du feu en deux réchauds, près lesquels lui frottai la nuque, bras et jambes, évitant les parties pectorales, avec liniments ci-devant écrits, pour les rétractations et spasmes. Après enveloppai ledit patient dans un drap chaud, le situant audit fumier, l’ayant premièrement garni et couvert de paille blanche : puis fut dudit fumier très bien couvert où il demeura trois jours et trois nuits sans se lever […], cependant commença un petit à ouvrir la bouche, dont peu à peu lui aidai avec tel instrument, lequel je mettais entre ses dents. Après avoir ouvert la bouche par ce dit instrument, lui mettais un petit bâton de saux, afin que la bouche demeurât ouverte, ayant retiré ledit instrument. Et cependant qu’il ne pouvait mâcher, je lui faisais donner du lait de vache et œufs mollets : par ces moyens fut guéri dudit spasme.
Réf : Ambroise Paré, Les Œuvres, Paris, Gabriel Buon, 1585, 12e livre, chap. XXXVIII, p. 493.
Texte lu par Thomas Rortais.
Licence
Creative Commons Attribution 4.0 International (CC-BY-4.0)Collection
nakala:title | Français | Ménager le confort du patient | |
Anglais | Ensuring the Patient's Comfort | ||
nakala:creator | Ambroise Paré et Thomas Rortais | ||
nakala:created | 2020 | ||
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Texte de Ambroise Paré lu par Thomas Rortais. Enregistrement : service PAVM | DNUM de l’Université Jean Moulin Lyon 3 dans le cadre du webdocumentaire https://medecin-et-douleur-16e18e.huma-num.fr/ Introduction (Raphaële Andrault et Ariane Bayle) : Dans le livre Des Contusions, combustions [brûlures] et gangrènes, Paré raconte plusieurs cas tirés de sa longue expérience de la chirurgie militaire. Il fait ici le récit des difficultés qui ont rythmé la cure d’un soldat amputé du bras lors de la campagne de Turin en 1536. Le chirurgien observe les signes de la douleur extrême éprouvée par le patient quinze jours après l’amputation et souligne à quel point les mauvaises conditions de vie du convalescent aggravent cette douleur. Le soin que met Paré à réchauffer le corps du soldat par tous les moyens, puis à l’alimenter, témoigne bien de la compassion et de l’attitude charitable que le chirurgien montre constamment dans ses écrits. Texte (Ambroise Paré) : […] Je ne puis omettre à raconter (pour s’en donner garde) que quinze jours après survint au pauvre soldat un spasme, lequel j’avais paravant pronostiqué à cause du froid, et qu’il était mal couché en un grenier, là où non seulement avait peu de couverture, mais aussi était exposé à tous vents, sans feu, et autres choses nécessaires à la vie humaine. Et le voyant en tel spasme et rétractation de membres, les dents serrées, les lèvres et toute la face tortue et retirée, comme s’il eut voulu rire du rire sardonique, qui sont signes manifestes de convulsion : ému de pitié, et désirant faire le dû de mon art, ne pouvant autre chose lui faire pour lors, le fis mettre en une étable, en laquelle était grand nombre de bétail, et grande quantité de fumier, puis trouvai moyen d’avoir du feu en deux réchauds, près lesquels lui frottai la nuque, bras et jambes, évitant les parties pectorales, avec liniments ci-devant écrits, pour les rétractations et spasmes. Après enveloppai ledit patient dans un drap chaud, le situant audit fumier, l’ayant premièrement garni et couvert de paille blanche : puis fut dudit fumier très bien couvert où il demeura trois jours et trois nuits sans se lever […], cependant commença un petit à ouvrir la bouche, dont peu à peu lui aidai avec tel instrument, lequel je mettais entre ses dents. Après avoir ouvert la bouche par ce dit instrument, lui mettais un petit bâton de saux, afin que la bouche demeurât ouverte, ayant retiré ledit instrument. Et cependant qu’il ne pouvait mâcher, je lui faisais donner du lait de vache et œufs mollets : par ces moyens fut guéri dudit spasme. Réf : Ambroise Paré, Les Œuvres, Paris, Gabriel Buon, 1585, 12e livre, chap. XXXVIII, p. 493. Texte lu par Thomas Rortais. |
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Anglais |
https://medecin-et-douleur-16e18e.huma-num.fr/en/excerpts Introduction (Raphaële Andrault and Ariane Bayle, translated by Sarah Novak): In his book Des Contusions, combustions et gangrènes [Contusions, Burns and Gangrenes], Paré recounts several cases from his long experience of military surgery. Here he recounts the difficulties that occurred during the treatment of a soldier whose arm had been amputated during the Turin campaign in 1536. Paré notes signs of extreme pain experienced by the patient a fortnight after the amputation and points out how the convalescent's poor living conditions are aggravating this pain. The care that the surgeon takes to warm up the soldier's body by any means possible, and then to feed him, is an example of the compassion and charitable attitude that he constantly demonstrates in his writings. Ref: Ambroise Paré, Les Œuvres, Paris, Gabriel Buon, 1585, 12th book, chap. XXXVIII, p. 493. |
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dcterms:language | dcterms:RFC5646 | français (fr) | |
dcterms:subject | Français | Douleur | |
Français | histoire de la médecine | ||
Français | Ambroise Paré | ||
Anglais | Douleur | ||
Anglais | history of medicine | ||
Anglais | Ambroise Paré |